Je rêvais de vivre cette procession depuis longtemps et c'est sur les conseils avisés de mon ami Christophe Mondoloni, que je décide donc de «monter» à Sartène le jeudi précèdent le catenacciu.
Il me recommande ainsi de faire la procession du jeudi Saint, qui selon lui est « plus intime ». C’est l’occasion pour moi aussi de « repérer » les lieux de passage du pénitent en suivant les « clous » qui les matérialisent, de m’imprégner de l’atmosphère qu’il règne au village, de suivre les préparatifs, d’entendre également quelques anecdotes, comme le fait que trois jours avant, « le pénitent est enfermé dans une cellule monacale du couvent San Damianu, où il médite, lit la Bible et prie ».
Le rendez-vous est pris à 18 heures pour suivre la messe à l’église Santa Maria et à 21 heures, pour suivre la « Procession des Sartenais ».
Je peux ainsi véritablement mesurer le côté « plus intime » de cette procession, il y règne en effet une réelle impression de recueillement, la foule est moins dense… « le calme avant la tempête du lendemain », malgré la très longue et dure ascension de la côte qui mène à la prière en l’église San Damianu.
Le Vendredi Saint à 21 h, j’ai l’honneur et la chance d’être présent à l’intérieur de l’église Santa Maria, d’assister à l’arrivée et aux préparatifs des pénitents. Un homme, le pénitent, cristallise à lui seul toutes les attentions dans sa quête de pardon.
J’ai tout de suite en tête les paroles de la chanson « Le porte croix » d’ Antoine Ciosi … « les pieds rouges de sang, il avance à pas lents, le porte croix…. Laissez passez le pénitent et ses pêchers…» parole qui laisseront vite place aux «Miserere» et «Perdono mio dio» et autres bruits singuliers des chaînes qui traînent sur les pavés de Sartène. Ils me resteront en tête pendant deux jours… et lui, il chutera trois fois sous le poids de sa croix et des chaînes qu’il porte sanglées à la cheville droite. Secrètement, on se pose toujours les mêmes questions...« mais qui est la Catenacciu ?»…« Quelles fautes graves a-t-il commises ?! » …questions qui restent sans réponses, seules restent les suppositions, les « je pense que c’est.. ». Seul le curé de Sartène connait le pénitent, protégé par le secret de San Damianu.
Moment impressionnant que l’entrée « en scène » du Catenacciu, d’une part par le silence qui l’ accompagne, mais aussi lors du moment de enchaînement devant l’autel…Les membres de la confrérie forment une haie d'honneur autour des pénitents, les portes s’ouvrent… surement un millier de personnes sont là… agglutinées, dans l’attente « de le voir », je saisi à ce moment-là, la ferveur et la passion qui accompagnent cette procession, mais que ce sera pour moi aussi « un chemin de croix » de suivre le pénitent sur tout son parcours.La première chute se déroule devant l'oratoire Sainte-Anne, l'église paroissiale de Sartène au XVIIIième siècle.
Toute la ville récite le "Notre Père" et le "Je vous salue Marie" pendant que le pénitent reste couché sur le sol. La seconde chute s'effectue sur la place Porta, au pied de l'église Sainte-Marie. A mi-parcours, le "catenacciu" est soulagé de son fardeau par le pénitent blanc. Avant la troisième chute et le retour vers Sainte-Marie, toute la procession fait une halte à l'église Saint-Sébastien.
Le "catenacciu" s'y recueille et prie agenouillé devant l'autel, au pied duquel se trouvent un Christ gisant et une Vierge drapée de noir. Après la troisième et dernière chute, le pénitent rejoint le parvis de l'église paroissiale. Je réussi à accéder à la terrasse d’une maison voisine, en hauteur, de là je peux voir passer la catenacciu et observer la foule écouter religieusement les paroles du prêtre.
Puis tous regagnent l'église Sainte-Marie pour s'y recueillir. Agenouillés ou couchés devant l’ autel, le pénitent attend que tous les pèlerins aient baisé un à un le Christ gisant.
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Pour aller plus loin, je vous invite à lire l’ouvrage de Christophe Mondoloni, « U catenacciu di Sartè », « l’enchaîné de Sartène » aux éditions Colonna.